Floirac, du belvédère à Mercure

Le point de rendez-vous porte un nom bucolique : le parc aux Angéliques, quai Deschamps. La circulation du quai l’est un peu moins. Claire Thiriet, du Grand Projet des Villes, aura besoin d’un porte-voix pour rassembler sa troupe, 25 personnes, venues de toute la métropole.


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récit et photos Françoise Duret

Le Belvédère, à l’horizon 2021

Maxime Alonzo, responsable du secteur « Souys » au sein de l’établissement public d’aménagement (EPA) Bordeaux-Euratlantique, sera le premier guide de cette Ligne Droite. Il vient évoquer le projet Belvédère, première phase d’un projet plus vaste encore, celui de la ZAC Garonne-Eiffel.

Dans la Maison du Belvédère, devant images de synthèse et maquettes, on s’y croirait : 126 hectares à cheval sur Bordeaux et Floirac, à transformer pour accueillir 7500 logements, un groupe scolaire, des bureaux, des commerces, un espace culturel, la place du Belvédère – équivalent rive droitier de la place de la Bourse – des voies de circulation douce, des quais à vitesse réduite, des bus en site propre, et puis le parc Eiffel (10 hectares de nature domestiquée) qui fait rêver.

Les questions fusent sur les transports, nerf de la guerre pour les citadins mais pas seulement. Ce couple de Montussan a le plus grand mal à venir travailler à Bordeaux. Lui faudra-t-il quitter son presque village ?

Françoise et Michel sont sceptiques : « Qu’est-ce qu’on est en train de faire de cette rive ? »

D’autant que les quais sont inondables, donc en théorie inconstructibles. « Tout l’enjeu est de créer des passages d’eau à travers les bâtiments, et de la canaliser dans des noues pour la stocker dans le parc Eiffel le temps qu’elle reparte à la Garonne, » explique Maxime Alonzo.

Au dehors, le quartier, longtemps endormi, vibre déjà des chantiers qui démarrent. Près de la cité de l’Espérance et ses petites maisons ouvrières aux jardins modestes et charmants, le groupe s’offre une pause autour du plan du projet. « Alors, là, les maisons ?.. » Elles disparaîtront, et avec elles tout le quartier, hormis la cité de la Fraternité.

Le renouvellement passe parfois par un grand bouleversement.

Au pied des immeubles, le Chant des Pavillons

Pour trouver la Fraternité, il faut laisser l’Espérance derrière soi. Est-ce un message ? Le parc de la cité est accueillant pour les randonneurs saturés de soleil. Une belle surprise les y attend. Trois musiciens portant galures et mitaines, emmitouflés dans de grosses gabardines, jouent pour les oiseaux et les habitants aux fenêtres.

« Oh la la ! Mais ils doivent avoir chaud ! »

Les musiciens de la Fausse Compagnie ont des faux-airs de bohémiens, mais de vrais airs mélancoliques et aériens à partager, improvisations vagabondes extraites de leur spectacle « le Chant des Pavillons ».

On les suit tandis qu’ils se dirigent, par les chemins cachés entre les cités, vers la voie Eymet. Le sentier laissé par l’ancienne voie ferrée accueillera vers 2025 un transport en commun en site propre. Pour l’heure, c’est un lieu de passage de piétons, de vélos… et, aujourd’hui, de musiciens poétiques et saugrenus, adeptes de la triple-croche acrobatique.

 

Un bouillonnement citoyen collectif

Quoi de plus logique, en cette compagnie, que d’arriver au Quartier Génial, lieu singulier où attend Mélissa Gentile, « facilitatrice » de ce tiers-lieux coopératif créé il y a un an ? « Ici ce n’est ni une entreprise, ni une maison. C’est entre les deux : un centre de ressources pour tous les porteurs de projets, les collectifs, les associations… Nous les aidons à faire émerger leur projets. »

Qu’il est bienvenu le bissap du RAFU ! Le Restaurant Floiracais Associatif Utopique, qui donne accès aux arts et autres nourritures, offre aujourd’hui le goûter.

Tout près, un bâtiment accueille la bricothèque, créée par des habitants à l’aide des budgets participatifs de la Ville, où tout un chacun, Floiracais ou non, peut emprunter des outils.

On est bien au cœur d’un bouillonnement citoyen collectif. Tout est à inventer. Ça tombe bien : ces gens-là ont l’énergie et les idées !

La visite du Quartier Génial, avec sa cuisine, sa salle de réunion où trônent les portraits des porteurs de projets, son espace de co-working, et sa coopérative à l’étage, donne envie de s’y installer. Ce sera pour une autre fois.

«  Mérignac c’est bien, mais c’est plat ! »

Sau Kuen, bordelaise de Hong-Kong (ou l’inverse) est sous le charme. Mais les clichés ont la peau dure : « C’est comme un autre pays, chez vous. C’est la 1ère fois que je viens de ce côté-ci alors que ça fait plusieurs années que j’habite Bordeaux. On a peur de franchir la Garonne. » On fait promettre à Sau Kuen qu’elle reviendra bientôt. Et pour la séduire un peu plus, on a rendez-vous à la M270 avec Kamel Meziani, coordinateur adjoint de la Maison des savoirs partagés. M comme maison, 270 comme le code postal de Floirac.

Kamel est un enfant du quartier. Il y a grandi, l’a quitté et il est revenu : « Je pourrais habiter Mérignac. C’est bien, mais c’est plat ! Ici, j’ai le coteau. J’ai grandi en le regardant. Chaque saison a sa palette de couleurs. »

La M270 est née avec le renouvellement du quartier en 2004. « Ici, on a créé un espace de vie où tout est gratuit, et pas seulement pour les Floiracais. »  Aujourd’hui l’ancienne Maison des arts et loisirs comprend une médiathèque, une salle de sport, une salle de spectacle modulable de 360 places, un studio d’enregistrement, une salle multimédia et même un café associatif créé par les habitants.

La Rive Droite, l’autre planète habitable

La dernière ligne droite de cette Ligne Droite grimpe à 15% environ dans le coteau. Le chemin de Tirecul est une bien douce appellation pour cette remontée non mécanique. Il passe au large du domaine de Sybirol qui intégrera bientôt le fil vert du parc des coteaux, qui trace son chemin de Floirac à Bassens.

Au 3/4 du chemin, le groupe est capté par Charlotte Hüni, grande ordonnatrice de panOramas, biennale qui donne à découvrir la Rive Droite en suivant des parcours artistiques. Un portail exceptionnellement ouvert laisse entrapercevoir le parc de l’Observatoire où l’équipe de panOramas a établi son QG pour sa 5ème édition.

« On va vraiment entrer ? » Mais oui, madame ! Propriété de l’Université de Bordeaux 1, les 15 hectares du parc de l’Observatoire sont rarement accessibles au public. Aujourd’hui, c’est la caverne d’Ali Baba qui s’ouvre devant les yeux éblouis du voyageur : des trésors de nature ponctués de coupoles astronomiques, où des êtres végétaux étranges, les « Pheuillus », nous accueillent. « Ce sont les visiteurs qui étaient présents à la dernière éclipse de lune. Ils ont été pétrifiés ! » assure Charlotte. On en connaît qui, comme les Pheuillus, aimeraient bien devenir locataires à temps plein.

Justement, ce soir c’est nuit d’éclipse. Quand la lune sera haute, les chercheurs de l’association Sirius ouvriront le « petit équatorial » et déploieront un télescope pour permettre à tous d’observer le phénomène.

Mais avant la nuit, les marcheurs, rejoints par une foule impressionnante, vont se laisser de nouveau porter par les improvisations de la Fausse Compagnie, se perdre dans les graminées où se cachent les minots ravis, se griser du soleil couchant qui dore les prés immenses, avant de se retrouver pour des agapes plus terrestres.

Sau Kuen avait (un peu) raison. La Rive Droite, c’est une autre planète, mais habitable.

 

Pour aller plus loin

Vers le Projet Garonne-Eiffel

Dans la maison du Belvédère

Avec la fausse Compagnie

Au Quartier Génial

À la M270

Sur les itinéraires de la boucle verte

Dans la Nuit verte de Panoramas

Avec l’association Sirius

 

Texte et photos Françoise Duret

 


Ligne(s) Droite(s), balades en compagnie…

Proposées par le GPV Rive Droite, les Ligne(s) Droite(s) sont 8 balades, en compagnie d’experts et d’habitants, pour faire découvrir au public de l’Été métropolitain la Rive Droite, son patrimoine, ses paysages, ses bons coins, ses initiatives et projets, son histoire, ses histoires….

Dans le cadre de l’Été métropolitain 2018 programmé par Bordeaux métropole, le GPV Rive Droite propose Ligne(s) Droite(s) : 8 balades en compagnie d’experts et d’habitants qui guideront les marcheurs pendant quelques heures à la rencontre des parcs, du patrimoine ancien et contemporain, des secteurs de projet urbain et des gens qui font bouger la Rive Droite à Bassens, Bordeaux-Bastide, Lormont, Cenon et Floirac.

 

 

 

 

 

 

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