Du champ à l’assiette : partenariat en cours

L’été tient ses promesses dans les champs et ça commence à se voir dans les assiettes de la restauration collective. Focus sur le partenariat entre producteurs locaux et cuisines centrales. Au fil du PAT épisode 4

 

L’événement a quelque chose d’historique, comme un premier pas sur la lune… à niveau très modeste. Les premières livraisons de légumes biologiques par les Jardins Garonnais, premiers maraîchers du PAT à entrer en production cette année, aux cuisines centrales du territoire ont eu lieu fin juin et tout début juillet.

Livraison à la cuisine de Bassens – juin 2024 ©FrançoiseDuret

 

50 kg de courgettes par ici, 40 kg de concombres par là, pas de quoi alimenter en totalité les 7 000 repas produits quotidiennement pour la Rive Droite, mais assez pour y contribuer. L’été arrive, la majorité des convives est en vacances : avec un nombre de repas divisé par trois, il sera d’autant plus facile d’intégrer dans les menus communaux la production naissante du Canon.

Le Projet Alimentaire Territorial de la Rive Droite n’en est qu’à ses débuts, l’expérimentation se met en mouvement, lentement, mais sûrement.

Un partenariat cousu main

Les Villes du PAT ont des tailles, des organisations (les menus sont programmés 3 mois à l’avance pour Bassens, 6 mois pour le SIREC) et des contraintes budgétaires différentes. Mais aussi des pratiques spécifiques en cuisine : Bassens produit 800 repas par jour ; Lormont,  2 100 ; le SIREC – Syndicat intercommunal de restauration collective- qui fournit Floirac et Cenon, 6 000. Le tout dans un contexte de marchés publics nécessairement réglementés.

La dynamique de transition repose donc sur le partenariat des producteurs locaux et des cuisines municipales. Ici le rôle du GPV est de mettre en lien toutes les parties prenantes, de faciliter le dialogue et de coordonner la mise en œuvre.

Chaque élément du partenariat a été envisagé, pesé et discuté dans les moindres détails : définition des besoins, nature des légumes, quantités, tarifs, transformation des produits, délais de livraison, aléas de production et éventuelles modifications de commandes. On a parlé courgettes, concombres, tomates, courges d’automne et patates douces… mais surtout planifié les premières commandes d’été, tout en anticipant sur 2025.

Pour cette première année où les producteurs expérimentent les possibilités de plantation et de gammes de légumes, c’est la production qui aiguille les commandes. Petit à petit et jusqu’en 2025, les besoins des communes guideront davantage la production.

 

Marché public et production locale

Comment entrer dans un marché public quand on est un petit producteur local ? Nos producteurs locaux (les Jardins Garonnais, Les Coteaux Paysage et Cycloponics*) le savent : ils ne seront jamais vraiment compétitifs sur le marché de négoce, face à des fournisseurs de gros et demi-gros, ou de grosses exploitations, même en bio. Qui plus est, l’agriculture est loin d’être une science exacte. Elle est sujette à des aléas. De production, tout d’abord : impossible de savoir sur quel volume on va pouvoir compter en début de saison, au moment où sont faits les semis. Or, du volume récolté dépendra le prix « sortie de champ ». Aléas météorologiques, ensuite : l’excès de pluie du printemps a déjà retardé les récoltes d’été.

Pour les producteurs du PAT, le moment est crucial… dans les champs, mais aussi sur le plan administratif. Sur les marchés publics, tout se joue à plus gros volumes. Les quatre communes de la Rive Droite font partie du groupement d’achat de l’ADARCE** coordonné par Bordeaux Métropole, en cours de réécriture pour les quatre prochaines années (2025-2029). Côté producteurs, il s’agit de ne pas rater le coche pour faire acte de candidature. Une piste de coopération entre professionnels de l’agro-alimentaire est en voie d’élaboration.

*L’association de l’économie sociale et solidaire l’Atelier des Coteaux se prépare à intervenir au Grand Tressan. Cycloponics produit des champignons bio dans deux caves agricoles souterraines, à Floirac et Lormont, depuis 2019 et 2022.

**L’ADARCE (acronyme de Achats de denrées alimentaires pour les restaurants de collectivités et d’entreprises) est un groupement d’achat, coordonné par Bordeaux Métropole, qui réunit 16 communes pour tout ou partie de leurs achats.

Petits légumes… grosses ressources locales !

Les courgettes des Jardins Garonnais – juin 2024 – ©FrançoiseDuret

C’est là qu’un autre opérateur du domaine alimentaire fait son apparition : la légumerie GP4G. Implantée à Saint-Loubès, c’est une petite entreprise de dix salariés, spécialisée dans la transformation des légumes en produits de 4ème gamme (le frais prêt à l’emploi). Or, les quatre villes ont besoin des services d’une légumerie externe pour transformer la plupart des produits bruts issus du maraîchage local. En 2025, GP4G pourrait intégrer le marché de l’ADARCE.

La petite légumerie, forte de sa réactivité, de sa capacité d’adaptation et de son réseau de producteurs locaux, pourrait alors jouer un rôle d’intermédiaire essentiel entre les producteurs du PAT et les Villes. Et devenir un élément facilitateur et centralisateur dans le circuit local de production, incontournable pour que le projet change un jour de dimension. Comme le souligne Yann Le Gouic, accompagnateur du PAT sur la question de la mise en place des outils de production : dans tous les territoires, la légumerie est la clé de voûte de l’échec ou de la réussite des projets.

Et ça vaut le coût (et le goût) !

Les Villes de la Rive Droite en sont convaincues : d’autres facteurs doivent intégrer leur logique d’achat, même s’il est essentiel que leur budget reste équilibré et transparent vis à vis des administrés. Le PAT est un projet engageant pour l’avenir, un pari vertueux et juste.

Dans le cadre d’une action qui vise à développer un système alimentaire durable, à garantir une alimentation saine et accessible à tous, à reconnecter la production locale avec les habitants, à préserver la biodiversité et à réduire le gaspillage alimentaire, le prix n’est pas le seul facteur de compétitivité. La qualité du produit et l’impact dans le tissu local économique et environnemental entrent également en compte. Les produits bruts en circuit court coûtent souvent moins chers que des produits ultra transformés qui ont fait des kilomètres en camion frigo, comme ceux qui sont utilisés dans de nombreuses cuisines collectives. Et le bénéfice pour la santé est, quant à lui, inestimable.

 


Au fil du PAT, reportage au long cours sur la mise en œuvre du Projet Alimentaire Territorial  de la Rive Droite

Texte et photos : Françoise Duret

Découvrir les épisodes précédents

Au fil du PAT #1 : Les origines

À Floirac, une parcelle vraiment Canon !

Au Canon, les légumes ramènent leur fraise !


 

Le Projet Alimentaire Territorial des villes de Bassens, Lormont, Cenon et Floirac vise à développer une alimentation saine et durable, accessible à tous. La restauration collective publique, levier majeur de transition alimentaire, est placée au cœur du projet. Coordonné par le GPV, le PAT de la Rive Droite est mené en lien étroit avec le monde de la recherche.

Lauréat des appels à projet « Quartiers Fertile » de l’ANRU et « Mieux manger pour tous » du Ministère des Solidarités.

Voir toutes les actus