Adeline Aird est chargée de mission au Conservatoire Botanique National Sud Atlantique. Dans le cadre du programme « Biodiver’Cité » commandité par Bordeaux Métropole, elle réalise un inventaire des prairies dans le parc des Coteaux.
Objectif : évaluer l’impact du pâturage des moutons sur la végétation du parc des Coteaux.
Loupe à la main, sac au dos, GPS à la ceinture et bordereau d’inventaire phytosociologique sous le bras, Adeline Aird s’engouffre dans le parc Beauval à Bassens. Botaniste phytosociologue pour le Conservatoire Botanique National Sud Atlantique (*), elle a pour mission de réaliser l’inventaire de toute la végétation qui s’y trouve. Avant que le troupeau de Rachel Léobet ne vienne y prendre ses quartier de printemps.
« Je suis chargée de cartographier la végétation présente dans tous les parcs du parc des coteaux avant l’arrivée des moutons. Je repasserai ensuite après leur passage pour faire un inventaire final», détaille Adeline Aird. Un travail de fourmi que la jeune femme mène comme une enquête. L’énigme à résoudre étant celle de l’influence des moutons sur la flore : « Cet inventaire permettra d’étudier l’évolution de la végétation en fonction de la gestion mise en place. Nous avons établi des zones témoins où les moutons n’auront pas le droit de paître. Nous pourrons donc voir quelles sont les différences entre une prairie fauchée et une prairie pâturée ». Les conclusions seront rendues en 2020, à la fin de la 1ère phase de l’expérimentation du pâturage itinérant. Mais Adeline Aird a déjà quelques pistes en tête : « On sait que le piétinement favorise certaines espèces, plus résistantes, comme le Plantain ou la Pâquerette. En mettant certaines zones à nu, le piétinement permet aussi à des espèces annuelles de germer, ce qui peut augmenter la diversité des espèces ».
Dans la grande prairie du parc Beauval, la jeune femme distingue deux parcelles : l’une plus colorée, où elle recense des Silènes fleur de coucou, des Lotiers corniculés ou encore des Compagnons blancs. Et aussi, de l’Oenanthe faux-boucage. Une plante dont le tubercule pourrait être toxique pour les moutons… Adeline Aird préviendra Rachel Léobet, la bergère, de la présence de ces plantes : par précaution, les moutons ne devront pas y paître. L’autre parcelle est plus verte : les graminées comme le Fromental ou la Fétuque élevée ont pris le dessus. « Cela prouve que le substrat y est plus riche en éléments nutritifs : c’est une fausse bonne nouvelle parce que cela signifie que la flore y est moins diversifiée », explique Adeline Aird. « Mais les moutons devraient apprécier tous ces graminées ! », poursuit-elle.
Le long du sentier qui borde l’une de ces prairies, Adeline Aird s’arrête devant une jolie fleur en cloches : « C’est de l’ail rose, une espèce rare et protégée ». Depuis 2002, cette plante rare, originaire des régions méditerranéennes, bénéficie, en effet, d’un statut spécial : un arrêté interministériel en interdit, en tout temps, sur le territoire de la région Aquitaine, la destruction, la coupe, la mutilation, l’arrachage, la cueillette ou l’enlèvement, le colportage, l’utilisation, la mise en vente, la vente ou l’achat.
Après Beauval, Adeline Aird se rendra aux parcs Rozin et Panoramis, toujours à Bassens. A chaque fois, elle doit avoir fini l’inventaire avant l’arrivée du troupeau. Un timing serré mais maîtrisé : alors qu’elle sort du parc, la bétaillère transportant les 26 moutons se fait entendre. Ils vont pouvoir goûter aux saveurs des prairies de Beauval.
(*)Le Conservatoire Botanique National Sud Atlantique
Basé à Audenge, le conservatoire botanique national Sud Atlantique (BNSA) se donne 4 missions :
- développer les connaissances relatives à la flore
- conserver et protéger les espèces, et notamment les espèces menacées
- accompagner les établissements publics ou les collectivités territoriales lors de missions d’expertise en matière de flore sauvage et d’habitats naturels et semi-naturels, par exemple.
- Informer et sensibiliser le grand public à la connaissance et à la préservation de la diversité végétale.
Auteur : Aline Chambras
Rendez-vous début juin pour l’épisode # 4 : La fête à Rozin
A propos du pâturage
L’expérimentation d’un pâturage itinérant dans le parc des Coteaux, initiée en 2019, est un projet du parc LAB, le laboratoire du parc des Coteaux, démarche collective rassemblant élus, directeurs de service et jardiniers des 4 villes de Bassens, Lormont, Cenon et Floirac pour mettre en œuvre une gestion écologique des 10 parcs municipaux* constituant le parc intercommunal des Coteaux.
L’objectif majeur du pâturage est de mettre en place une gestion écologique des espaces de prairies présents dans le parc des Coteaux. D’une surface totale de 60 hectares, ces espaces de prairies portent un enjeu fort de préservation des espèces animales et végétales en adéquation avec les usages quotidiens des parcs. Des papillons tels que l’Azuré du serpolet (Phengaris arion) ou le Citron de Provence (Gonopteryx cleopatra) se développent dans ces prairies calcaires spécifiques des coteaux de la rive droite de la Garonne.
Le projet de pâturage du parc des Coteaux est porté par les communes de Bassens, Lormont, Cenon, Floirac et le Grand Projet des Villes Rive Droite avec le soutien de Bordeaux Métropole, du Département de la Gironde, de Domofrance et Clairsienne.
* il s’agit des parcs de Beauval, Rozin, Panoramis et Séguinaud à Bassens ; Carriet et Ermitage à Lormont ; Palmer et Cypressat à Cenon ; Sybirol, Castel et Burthe à Floirac