Depuis Octobre 2010, un groupe d’amis fait vivre Les Gourmandignes, une AMAP dans le bas Cenon. Lieu de rencontre entre producteurs et consommateurs à la fibre citoyenne. Visite…
Nous sommes jeudi soir, il est près de 19 heures et là haut, à Palmer, on entend Mory Kanté introduire en musique le dernier meeting de la campagne de François Hollande, à trois jours du 1er tour. Oui, vous l’avez deviné, nous sommes à Cenon. Rue Arago, plus précisément, où l’AMAP Les Gourmadignes tient ses distributions hebdomadaires. Ils sont d’ailleurs déjà là, Elie, Pascal, Julie, mettant la dernière main à l’installation des « stands » des producteurs partenaires. Çà tombe bien, j’ai plein de questions à leur poser.
C’est quoi une AMAP ?
Le principe des AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) est né au Japon dans les années 60. Des mères de familles, inquiètes des conditions de production de leur alimentation fondent des « teikei » ou coopératives qui leur permettent de s’approvisionner en lait directement auprès de producteurs sélectionnés pour la qualité de leur exploitation et l’absence de produits chimiques dans leur production. On ne parlait pas encore de « bio » à cette époque.
L’idée fait bientôt florès et d’autres structures de ce type apparaissent en Suisse et aux USA, puis en Angleterre, au Danemark, en Allemagne… Et en France.
Ce n’est qu’au début des années 2000 que les premières AMAP se créent en France, à l’initiative de maraichers d’Aubagne, se créent en France. En quelques douze années, le nombre d’AMAP en France a dépassé les 1200 et chaque semaine voit la création d’une nouvelle association.
Les AMAPS sont donc des associations dont l’objet est de rapprocher producteurs et consommateurs, permettant aux premiers d’écouler leur production à des tarifs corrects et aux seconds d’accéder à des produits de qualité, souvent bios, à des prix abordables. Pour le consommateur, c’est également la possibilité de connaître la personne qui le fait manger, puisque les producteurs sont présents lors des distributions, et pour le producteur, la formule a de nombreux avantages dont celui de lui permettre d’anticiper sa demande et sa production.
Comment ça marche ?
C’est à la fois simple et compliqué.
Si vous êtes intéressés par les AMAP, vous devez adhérer à une association, moyennant une modique cotisation annuelle. Ensuite vous choisissez la formule qui vous convient le mieux, du panier hebdomadaire au demi-panier. Mais ça, c’est seulement pour les légumes. Aux Gourmandignes, sont également proposés des paniers volailles, produits laitiers, boucherie et même asperges (pendant le mois et demi que dure la saison). L’engagement est annuel, ce qui signifie que vous réglez à l’avance. Ne vous inquiétez pas, vous faites douze chèques qui seront débités au fur et à mesure. Pas de quoi affoler votre compte en banque… Par exemple, une famille de quatre personnes désireuse de s’approvisionner en légumes choisira le panier Légumes de saison, dispensé par Marie-Jo et Joël Dalongueville, maraîchers à Saint-Ciers de Canesse qui, pour 17€ par semaine (soit 74,34€ par mois) vous fourniront en légumes bios. A vous ensuite de déployer toute votre imagination pour cuisiner de manière inventive ces merveilles potagères.
Et les contraintes ?
Seule contrainte imposée par l’association, chaque adhérent doit s’engager à tenir au moins une permanence durant l’année ; ce qui, avouons-le, n’est pas hors de portée. Sinon, il faut bien sûr être présent au jour et lieu de distribution, le jeudi entre 19 heures et 20 heures car qu’on se le dise, l’AMAP ne fait pas les livraisons !
L’esprit de l’AMAP, c’est la solidarité. Il peut donc arriver que les aléas climatiques empêchent une récolte ou détruisent celle-ci. Solidarité, donc, les adhérents s’engagent donc à ne pas réclamer leur panier si le producteur n’est pas en mesure de le fournir.
Quels avantages ?
Ils sont multiples. Tout d’abord, notre récente visite aux Gourmandignes nous a convaincu que l’accueil de cette AMAP est cent coudés au dessus de celle du rayon frais ou primeurs de l’hyper du coin. Qui se connait se salue, qui ne se connaît pas se présente et découvre ses nouveaux amis autour d’une bière ou d’un verre de cidre bio. Toujours dans le registre des relations sociales, reconnaissons qu’il est fort agréable de pouvoir rencontrer le monsieur qui fait pousser vos asperges ou discuter de la pluie et du beau temps avec la propriétaire des poules qui ont fait les œufs. Eh oui, la traçabilité, ce n’est pas seulement sur l’étiquette qu’on la trouve mais également dans l’échange… Et les enfants apprennent ainsi que les oeufs ne poussent pas dans les boîtes ou que le lait n’est pas fabriqué en usine, ce qui pour certains est une grande découverte.
En outre, pour ceux qui, comme vous et moi, sont soucieux de la qualité des produits qu’ils consomment, la proximité géographique des producteurs et de l’AMAP permet une distribution de produits de première fraîcheur. « Cueillis le matin, livrés le soir », nous disait Marie-Jo Dalongueville devant sa table chargée de paniers de légumes, visiblement en pleine forme (Marie-Jo et ses légumes).
Pour finir, ces productions sont évidemment agrobiologiques, voire biodynamiques, et garantissent ainsi l’absence de traces de substances portant des noms de médicaments sur nos aliments. Vous je ne sais pas, mais moi, ça me rassure…
Quels inconvénients ?
Il y en a, sans doutes, mais ils sont relatifs. Certes, l’approvisionnement en produits bios suppose un certain travail de préparation une fois rentré à la maison. De la cuisine plus que d’habitude, un congélateur qui se remplit, des menus à anticiper et des convives à éduquer (« encore des courgettes ! »). Mais en compensation, vous accédez ainsi à des aliments de qualité tout en contribuant au maintient d’une agriculture de proximité et en participant à la survie de producteurs qui, sans les AMAP et autres Ruches, iraient bientôt rejoindre la longue liste des métiers disparus.
En résumé, l’AMAP, ce n’est pas seulement une belle idée ou une bonne action, c’est aussi une contribution à la survie d’une agriculture locale et de produits frais de qualité. Et c’est enfin l’assurance de manger sain des denrées produites par de vraies gens que vous connaissez. Ecolo, sociale, locale et équitable, avouez que ces AMAP font autant de bien à l’esprit qu’au corps.
Pour en savoir plus :
Les Gourmandignes : le site Web
Le réseau CréAMAP : le site Web